Lipœdème et lipo-aspiration des jambes.
La technique de WAL.
Thomas WITTE, MD.,
Falk-Christian HECK,MD.
LipoClinic Dr. Heck, Zeppelinstr. 321, D – 45470 Mülheim an der Ruhr, info@lipo-clinic.fr
Résumé
Le lipœdème est une maladie démographique ayant un impact important et dont les caractéristiques ont été souvent mises en évidence.
La liposuccion est – indépendamment du jugement de la caisse d’assurance maladie – la seule méthode permettant de réduire les tissus adipeux pathologiques, en apportant aux patientes de grands avantages durables.
Mots-clés : lipœdème, liposuccion, qualité de vie, méthode ALT (anesthésie locale par tumescence), méthode de WAL (liposuccion assistée par jet d’eau)
Introduction
Le lipœdème a été nommé pour la première fois en 1940 dans la littérature médicale par Allen et Hines (1).
La maladie est maintenant totalement reconnue et listée dans la classification internationale des maladies de l‘OMS (ICD – International Classification of Diseases) avec son propre code (E88.xx) (20).
Aujourd’hui, le registre dans les banques de données médicales est long lorsque l’on fait une recherche sur le lipœdème.
La « Deutsche Gesellschaft für Phlebologie » (Société Allemande de Phlébologie) a même développé de propres lignes directrices sur le sujet. (8).
Les causes de la maladie ne sont pas encore totalement explorées.
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Pour résumer, on part du principe que l’hormone féminine œstrogène, en raison d’une production accrue de facteurs de croissance, conduit à une augmentation et un agrandissement des cellules adipeuses (29,30).
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A cause de l’importante augmentation de ces cellules adipeuses, on en arrive à un manque d’oxygène dans les tissus de sorte qu’une partie des adipocytes meurt (31).
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Cela entraîne à son tour une inflammation chronique, qui conduit à une détérioration des tissus.
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En outre on constate une perméabilité plus élevée de la paroi des vaisseaux qui laissent passer une plus grande quantité de lymphe dans les tissus, laquelle ne peut plus être évacuée par le système lymphatique resté intact (nommé insuffisance due au grand volume de lymphe à évacuer).
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Cela entraine une impression de pression et de tension ressenties par les patientes, tout à fait typique.
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En plus, en raison d’une plus grande sensibilité des récepteurs de la douleur, les tissus changent et provoquent des douleurs spontanées, dont les patientes se plaignent souvent. On remarque également une tendance aux hématomes induits par une grande fragilité des vaisseaux capillaires (35).
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On présume que la prévalence dans la population féminine est de 8 à 17% (11,18,23).
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Seule pour la France, cela correspond à un total d’environ 5 millions de femmes atteintes.
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La maladie ne touche les hommes que très rarement. Et est associée dans la plupart des cas à un dérèglement hormonal. Actuellement, il n’existe que quelques rapports individuels sur ce sujet (4,10).
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Les symptômes
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Très souvent, ce sont des hasards qui amènent au diagnostic du lipœdème. Les patientes reconnaissent leurs symptômes par exemple à travers des reportages télévisés et des remarques de leur entourage concernant l’aspect bizarre de leurs jambes.
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Bien que la maladie soit connue depuis déjà 80 ans, le savoir concernant le lipœdème est encore très sous-développé dans de nombreux endroitsMême dans des pays tels que la France, l’Allemagne, l’Espagne ou la Belgique, il n’y existe que quelques spécialistes qui se consacrent à ce sujet.
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Le symptôme principal est la douleur (33).
Des douleurs de pression, au toucher, spontanée, de tension ou au mouvement peuvent apparaître en même temps ou indépendamment les unes des autres. -
La tendance aux hématomes sans traumatisme persiste (5,28).
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La transformation physique des bras et des jambes favorise également la stigmatisation des patientes.
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Il apparaît de manière symétrique et bilatérale.
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Normalement, les pieds et les mains ne sont pas touchés.
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Au début, on ne voit pas de creux au niveau du talon d’Achille (10).
C’est en fonction de l’aspect clinique que le stade d’évolution de la maladie est déterminé. On définit trois stades.
L’évolution étant très individuelle, il n’est pas possible de faire de pronostic. (7).
Le diagnostic
A la différence de celles atteintes d’obésité, le lipœdème ne réagit pas du tout ou très aux tentatives de perte de poids (1,13,34). Le signe de Stemmer (la peau du deuxième orteil ne fait plus de pli lorsqu’on la pince) représentant la limite entre le lymphœdème et le lipolymphœdème, est négatif (13,37,42). A l’heure actuelle, il n’existe pas d’appareils permettant de diagnostiquer le lipœdème de façon fiable.
Les ultrasons, l’imagerie par résonance magnétique (IRM) ou tomographie informatisée, ne peuvent que mettre en évidence les dépôts adipeux importants ou condensés (22,8,25,3,27).
La pose du diagnostic se fait à l’aide des critères cliniques (21,33).
Même l’analyse histologique des cellules pathologiques n’est pas spécifique, comme l’a montré Stutz en 2009 sur la base de 30 patientes atteintes de lipœdème et ayant subi une liposuccion selon la méthode WAL (40). Le conditionnement présentait avant tout des lipocytes. Dans le cas de la multiplication pathologique des cellules adipeuses sous-cutanées, on ne peut pas clairement montrer s‘il s‘agit d’une hypertrophie des adipocytes, d’une hyperplasie ou de la combinaison des deux (33).
Le diagnostic clinique repose sur l’anamnèse qui dévoile que le lipœdème se déclare la plupart du temps à la puberté, au début d’une grossesse ou de la ménopause (1,43).
Très souvent, il s’agit d’une anamnèse familiale positive, quoi que la littérature parle d’une fourchette allant de 16 à 64%, donc avec une fiabilité relative (1,16,38). Dans 97% des cas, ce sont les jambes qui sont touchées et dans 31% les bras (19). Selon nous les deux zones, jambes et bras, sont toujours atteintes, mais le développement au niveau des bras est souvent moindre ou se déclare plus tard.
Le traitement
Tout que comme pour le diagnostic, il existe encore peu de centres spécialisés dans le traitement du lipœdème. Ceci amène à des résultats de qualité très différente. Afin d’obtenir le meilleur résultat possible, il est conseillé de diriger les patientes vers un centre spécialisé dans la chirurgie du lipœdème.
Pendant de nombreuses années étaient considérés comme la meilleure option thérapeutique (12,19,41) la combinaison de :
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La décongestion physique grâce au port de vêtements de contention rectilignes à maille plate,
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La pratique du drainage lymphatique manuel la normalisation du poids
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Et si possible de compléter par un appareil domestique de compression intermittente.
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Ces mesures conduisent principalement à une réduction des œdèmes, mais ne parviennent pas à réduire les cellules adipeuses pathologiques. Bien que la décongestion physique soit recommandée dans les directives existantes, il n’existe cependant aucune étude basée sur les résultats (7,41). La qualité de vie des patientes est largement réduite (9) car elles doivent : porter à vie les vêtements de contention faits sur mesure, et faire régulièrement les drainages lymphatiques manuels.
Depuis 2004, la liposuccion dans le traitement du lipœdème est pratiquée avec beaucoup de succès (23,32).
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Dans ce domaine, la méthode ALT( anesthésie locale par tumescence), vieille de 30 ans, est de plus en plus souvent remplacée par la méthode WAL (liposuccion assistée par jet d’eau) plus moderne. Des études comparatives montrent que la méthode WAL ( Waterjet Assisted Liposuccion) moins de douleurs et moins de gonflements et que le patientes peuvent reprendre plus rapidement leur activité professionnelle.
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Pour travailler de manière efficace tout en assurant la sécurité maximale des patientes, 2 à 3 opérations sont nécessaires pour les membres inférieurs.
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Les bras se font normalement en une intervention.
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Le nombre des complications suite à cette méthode en utilisant un protocole standardisé est très faible de l’ordre de 1 à 2%, (36).
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La standardisation du traitement permet de reproduire de très bons résultats (19) (Abb. 3 und 4).
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Notre équipe a été la première au monde à publier en 2018 un protocole opératoire standardisé qui ne comprend pas que l’opération, mais également le suivi pré et post opératoire.
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Par exemple pour décongestionner les tissus, en préparation à l’intervention et à la période postopératoire, il est impératif que les patientes portent des collants de contention rectilignes à maille plate. Seuls ces vêtements compressifs – grâce à leur propriété dynamique – contribuent à la décongestion active des tissus. La liposuccion aux jambes et aux bras peut être faite en 3 ou 4 interventions.
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Cela dépend du poids de départ de la patiente, de la quantité de graisse et de la répartition des cellules adipeuses.
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Lorsque le volume à retirer dans les cuisses et fessier est trop important, il faut alors prévoir 2 opérations.
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Pour cela nous n’opérons qu’au moyen de la technique WAL (Water jet Assisted Liposuccion), cette méthode étant actuellement la plus moderne dans le traitement du lipœdème.
Photo N° 3. Technique de WAL. Grâce au jet d’eau sortant de la canule, les cellules adipeuses se décollent en douceur des tissus. Dans le même geste, les cellules pathologiques alors détachées sont aspirées par l’autre ouverture de cette même canule.
Au cours d’intervention distinctes, les jambes, cuisses et fesses ainsi que les bras sont décomprimés de façon circulaire. (Photos N°4,5,6,7).
Photo N° 4. Lipoedème au stade II au niveau des jambes avant l’opération.
Photo N° 5. À la fin de l’opération. Liposuccion de 2,3 l de graisse pure.
Photo 6. Lipoedème au stade II. Début de l’intervention avant l’injection de la solution tumescente.
Photo 7. Après la lipo-décompression des jambes. Au total 15 litres de graisse retirés en 3 interventions.
Conclusion
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Une prise en charge des coûts par la caisse d’assurance maladie n’a lieu aujourd’hui – aussi bien en Allemagne qu’en France – que de façon exceptionnelle, alors que les possibilités financières des patientes sont de plus en plus restreintes.
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En Allemagne, une étude randomisée prospective et multicentrique est actuellement en cours afin de prouver les avantages de la liposuccion.
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Les résultats ne seront connus qu’à partir de 2024. Ce n’est qu’à ce moment-là que sera décidé si la liposuccion est prise en charge par la caisse d’assurance maladie ou pas.
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